L’objectif général du décret tertiaire : de grandes ambitions
Le décret tertiaire s’impose aux bâtiments de plus de 1000 m², et leur impose de réduire leur consommation d’énergie finale de :
• 40% à horizon 2030
• 50% à horizon 2040
• 60% à horizon 2050
L’année de référence pour les consommations initiale est comprise entre 2010 et 2019.
Le choix de l’année de référence doit correspondre à l'année où il y a eu le plus de consommation d'énergie finale du bâtiment, à conditions climatiques lissées.
L’obligation concerne bailleurs comme locataires.
La question qui se pose est alors : que se passe-t-il pour les bâtiments déjà très performants, par exemple des bâtiments passifs construits entre 2010 et 2020 ?
La logique globale du décret et les bâtiments performants
Cette logique consiste à atteindre un objectif en valeur absolue, comme le montre le visuel ci-dessous, extrait de l’arrêté méthode du 10 avril 2020.
Figure 1 : objectif du décret tertiaire
Cette valeur absolue comporte deux composantes. La première composante, intitulée CVC, concerne à l’ambiance thermique générale et à la ventilation des locaux. Elle est donc étroitement associée à la conception du bâtiment, et à son optimisation par rapport aux besoins de chauffage, de climatisation et de ventilation. La seconde, dénommée USE, s’applique aux usages spécifiques énergétiques. Elle va donc concerner l’informatique, l’éclairage, et les autres usages de l’électricité dans les bâtiments tertiaires.
L’objectif en valeur absolue, aussi bien pour la composante CVC que USE, est précisé dans l’arrêté modificatif du 13 avril 2022. Il décline les différents niveaux à atteindre selon la typologie de bâtiment (bureaux, enseignement…), en tenant compte de la zone géographique et de l’altitude.
Les objectifs semblant avoir été calibrés sur le niveau de la RT2012 pour l’horizon 20301 , il est donc possible de définir le niveau 2050 par rapport au niveau RT 2012.
Ainsi, un bâtiment qui atteindra 2/3 de l’objectif 2030 ou de l’objectif RT2012 en 2050 sera conforme.
Les bâtiments passifs étant bien plus performants que les bâtiments RT2012 (voir illustration ci-dessous), il est quasi-certain que le niveau 2050 est déjà atteint.
Figure 2 : niveau de performance énergétique
Il s’agira naturellement de vérifier la conformité aux textes dans la durée, car des bâtiments peuvent « dériver », et les usages spécifiques peuvent également déraper en l’absence d’un pilotage attentif.
Retour sur investissement et modulation des objectifs
L’article 11 de l’arrêté du 10 avril 2020 prévoit en outre des possibilités de modulation des objectifs sur la base des temps de retours de l’investissement, pour tenir compte de la disproportion manifeste du coût des actions par rapport aux avantages attendus en termes de consommations d’énergie finales. Cette disproportion est établie dès lors que l’entreprise établit que le délai de retour sur investissement dépasse :
• 30 ans pour les actions de rénovations portant sur l’enveloppe du bâtiment (parois opaques et vitrées),
• 15 ans pour les travaux de renouvellement des équipements énergétiques du bâtiment,
• 6 ans pour la mise en place de systèmes de gestion, de régulation et d’optimisation en exploitation des équipements énergétiques
Plateforme OPERAT : à remplir dans tous les cas
Même dans l’hypothèse où le bâtiment respecte les objectifs 2050, l’entreprise est tenue à ses obligations de publication des chiffres de consommation énergétique.
• Cela permettra d’ailleurs de valoriser la société vis-à-vis de ses partenaires via la notation prévue par l’Etat, avec les « feuilles » « Eco Energie Tertiaire » :
• Feuille grise : Le niveau de consommation énergétique annuelle est en augmentation sans qu’il n’y ait eu de justification (modulation en fonction du volume d’activité)
• Feuille orange : Le niveau de consommation énergétique annuelle est situé en dessous du niveau de la consommation énergétique de référence mais au-dessus du fuseau enveloppe (+10% -10 %) de la droite de tendance.
• Une Feuille verte : Le niveau de consommation énergétique annuelle est situé dans le fuseau enveloppe (+10% -10 %) de la droite de tendance.
• Deux Feuilles vertes : Le niveau de consommation énergétique annuelle est situé en dessous du fuseau enveloppe (+10% -10 %) de la droite de tendance.
• Trois Feuilles vertes : Le niveau de consommation énergétique annuelle est situé en dessous de l’objectif exprimé en valeur absolue, le cas échéant modulé.
Figure 3 : les feuilles issues de la notation du décret tertiaire
Décret tertiaire : on a le droit d’être intelligent
Naturellement, un grand nombre d’entreprises vivent comme une contrainte l’arrivée du décret tertiaire, et son côté bureaucratique.
Pour autant, pousser à des économies d’énergie effectives, mesurables, au niveau du compteur d’énergie de l’entreprise, est plutôt une bonne chose, y compris pour les finances des sociétés concernées.
Ensuite, la dimension administrative a aussi la vertu de légitimer une démarche de communication valorisante, établissant l’exemplarité des structures concernées sur la base d’éléments tangibles.
Visuel d'illustration : Paradis-Express, réalisation passive du cabinet d'architecture A2M, Belgique
(1) Il y est fait référence dans le nota de la page 4 de l’arrêté du 24novembre 2020.